
C’est prévu d’y aller en 3 jours, 47 miles de Snug pour rejoindre Chichime, puis 44 miles de Chichime à Panamarina et enfin la bagatelle de 27 miles de Panamarina à Colón où il est prévu de se rendre à Shelter Bay Marina, visiblement le passage obligé pour traverser le canal mais nous n’en sommes pas encore là, moi je vis au jour le jour ce qui m’est possible puisque le capitaine s’occupe de tout ça et que je sais bien que si je m’en occupais je perdrais mon temps car il repasserait derrière moi aussi sûr que 2 et 2 font 4, par exemple je lui ai interdit d’ouvrir le frigo parce qu’il y trouve à redire sur mes rangements, et comme c’est moi qui fais à manger et bien je le range comme je veux le frigo, s’il veut ouvrir le frigo je lui saute dessus et l’en empêche, en échange pour la navigation je veux bien consentir à le laisser faire à son idée, ce qui est mieux pour tout le monde 😉
On se lève tôt, je ne sais plus à quelle heure mais 47 miles à faire au prêt, on en a pour quelques heures et on aura besoin du jour pour mouiller à Chichime ça c’est clair, donc on se lève tôt, on avale un bon petit dèj et zou … et là paf, il se met à flotter, bravo
C’est toujours sympathique de hisser la grand voile sous une pluie battante, comme dit le capitaine qui le tient de je ne sais plus qui, avoir un bateau c’est se prendre des seaux d’eau et dépenser des billets, c’est vrai que passer le canal de Panama ça coûte bonbon … en même temps, je lui expliquais un jour que ça coûterait beaucoup plus cher de faire le tour et il s’est emporté parce que ça n’a rien à voir, qu’on ne peut pas comparer ce qui n’est pas comparable, que ce sont des navigations TOTALEMENT DIFFERENTES ISABELLE, je m’entêtais à lui dire que d’accord, mais que faire le tour coûterait bien plus cher que de passer le canal, alors pourquoi ils s’embêteraient à faire moins cher, même que c’est sûr qu’avec un raisonnement comme le mien ils vont augmenter leurs prix, le capitaine n’en démordait pas, je compare ce qui n’est pas comparable et ça lui fait perdre grave son calme, je vous fais profiter de mon raisonnement inacceptable :

En plus descendre la côte Est de l’Amérique du Sud c’est aller à contre courant et contre le vent, c’est faire le tour du monde à l’envers, alors c’est une vraie galère !
Pour parfaire ma démonstration je lui ai aussi suggéré de comparer le prix que ça coûterait de sortir le bateau de l’eau et de le faire trimballer en camion de l’autre côté du Panama, il en aurait avalé sa chique s’il avait chiqué, il s’énerve de mes comparaisons ineptes et plus encore que ça me fasse marrer … je sais bien que naviguer comme on le fait n’a rien à voir avec ce que font les tourdumondistes, vendéeglobistes et autres marins brindezingues de cet acabit, n’empêche que ça coûte moins cher de passer par le canal 😉
Nous partons vers 8h30 et passons une super belle journée de nav, 20 à 25 nœuds au prêt, avec de la flotte, pour de bon c’est extra quand on a suffisamment dormi et qu’on a avalé du bon manger nourrissant (et que je ne fais pas de connerie à la manœuvre), on arrive à Chichime sur le coup de 17 heures, 47 miles en 8h1/2 on pourrait croire qu’on a traîné mais non, on a juste tiré des bords, 2 fois le temps et 3 fois la peine qu’il disait, et maintenant remerciez moi bien car voilà le capitaine qui range l’écoute de génois après un virement magistralement exécuté 🥳🥳🥳 :
Nous passons la nuit à Chichime et repartons dès l’aube pour filer sur Panamarina, une marina française créée par Jean-Paul et Sylvie il y a 10 ans, on voit sur Navionics qu’il va falloir jouer serré, l’entrée est étroite et le chenal peu profond, on a réservé une bouée et on sait que c’est la dernière de libre, arrivant un dimanche on se doute qu’on devra se débrouiller seuls, ce que préfère toujours le capitaine qui sait ce qu’il veut (j’aimerais aussi savoir ce qu’il veut) (le pouvoir ultime), après quelques heures de navigation pépère sans pluie et au travers, avec une mer bien vivante tout de même qui nous permet de travailler nos muscles profond gratis pour garder l’équilibre debout dans le cockpit, nous arrivons à l’entrée du chenal et, forts de notre expérience fâcheuse à Bonaire, passons du bon côté des bouées en surveillant la profondeur sur le pilote, la bouée libre est tout au fond, quand nous y arrivons le pilote indique 1,6 mètre, nous manœuvrons avec une délicatesse extrême pour nous y amarrer, sentant que le bateau touche parfois bel et bien le fond, vraiment pas profonde la marina … demain on nous dira que là c’est pour les catamarans, en attendant c’est la seule bouée libre que nous ayons vue, on est arrivés à marée basse et on se note l’heure de la marée haute demain matin pour ne pas prendre un risque inconsidéré en faisant une grasse matinée … comme je sais que notre tirant d’eau est de 2,3 mètres, je demande au capitaine mais comment se fait-il qu’on puisse aller jusqu’à 1,6 mètre voire 1,3 mètre de fond avant de se planter ? c’est le sondeur qui est placé plus bas, plus bas que quoi je ne saurais vous dire, mais vous aurez compris autant que moi





AAAAAH ! voilà que le jour est venu d’aller jusqu’à Shelter Bay Marina à Colón ! on a rencontré des canadiens à Coco Bandero, le père, la mère, les deux filles et la grand-mère, et cette dernière devait rentrer à Montréal mais pas avant d’avoir traversé le canal de Panama elle voulait le vivre, et ma foi je ne peux que la comprendre, c’est mythique au possible et je suis bien curieuse de voir comment ça se présente, et pour voir ça il faut déjà aller jusqu’à Colón … ce jour là on navigue avec un bon vent et une mer qui bouge bien le long de la côte panaméenne

jusqu’ici il n’y avait pas grand monde qui naviguait avec nous, mais en arrivant près de Colón ça commence à se bousculer !


Nous sommes attendus car le capitaine a réservé une place et prévenu de notre arrivée, alors on se pose comme une plume le long du catway après avoir passé les amarres aux gars de la marina, ensuite formalités à la capitainerie où on se voit offrir un teeshirt rose taille XXL Shelter Bay Marina, quel accueil, le capitaine s’en fiche comme d’une guigne mais moi je le mettrai, le rose me sied à ravir et puis c’est Shelter Bay Marina quoi !
on nous prévient d’emblée pour que l’on soit clairement prévenus : il y a des crocodiles … c’était déjà le cas aux San Blas, et comme on m’a raconté qu’aux Galapagos il y a des otaries qui viennent se coucher sur les jupes des bateaux ou carrément dans les cockpits (et que ça empeste durant des jours), quand je prenais ma douche sur la jupe arrière à ras de l’eau aux San Blas je me disais que ça serait bien ma veine qu’un crocodile ait la même idée et jaillisse à ce moment pour me bouffer un mollet, mais le ciel m’a épargnée, on n’a pas plus vu de crocodile que de baleine et mes mollets sont toujours rebondis …

Alors je vous explique, c’est tout un cirque pour traverser le canal, il faut prendre un agent, on vient nous mesurer le bateau, nous dire quand est-ce qu’on pourra passer, il faut qu’un pilote vienne à bord pour diriger les manœuvres, et aussi des hand liners (ou line handlers) qui aident à passer des amarres pour fixer le bateau quand on passe les écluses, on doit franchir d’abord 3 écluses montantes, qui permettent de s’élever de 30 mètres, ensuite on navigue sur un lac artificiel, le lac Gatún, puis on franchit 3 écluses descendantes pour redescendre au niveau de l’Océan Pacifique, il faudra que je fasse à manger pour tout ce monde là et que je serve aussi en tant qu’hand liner … le capitaine a demandé à ce que notre bateau soit calé au milieu des autres, on verra bien, on nous dit qu’on passe le 8 avril, ça fait quelques jours à patienter à la marina ce qui n’est pas vraiment du goût du capitaine à qui je dis que je trouve que ça fait partie du cérémonial, j’aime bien tout ce cirque qui entoure le passage … c’est un évènement unique !
Le lendemain nous prenons une navette pour aller faire des courses à Colón et passons au-dessus du canal … ça devient une réalité … dans quelques jours je passerai sous ce pont, si on m’avait dit ça …

Je passe devant un magasin de gâteaux hallucinants, il y en a un qui a une canette de bière en déco, c’est la bière nationale, la Balboa, quelle idée, un gâteau d’anniversaire pour un amateur de bière ?

Alors voilà, on attend le 8 avril, moi en travaillant et le capitaine en nettoyant la carène du bateau (le pauvre, c’est un boulot de forçat) et en étudiant la météo, les vents et les courants avec une méticulosité pointilleuse, il n’y a plus de vent ces jours ci et si on veut avancer dans le Pacifique on en aura besoin, alors il cherche une fenêtre météo qui nous permette de partir une fois le canal passé, ça devrait être le 10 avril, et après ça … trans Pacifique ! c’est à une autre échelle que tout ce qu’on a fait jusque là, je me prépare psychologiquement …
et me prépare aussi physiquement avec des plantes pour tonifier mon Qi, mon Sang, mon Yin et mon Yang, la capitaine dit que ça pue quand je les fais cuire (c’est vrai que ça sent fort, et c’est vrai que c’est dègue à boire surtout quand on a oublié d’emporter une passette suffisamment fine pour filtrer ses décoctions), comme j’ai été piquée par des moustiques, quand je me gratte il dit que je dois faire une réaction avec les plantes, il aimerait que j’arrête sur le champ de concocter mes breuvages méphistophéliques, je suis persuadée que c’est par crainte que je ne fasse une réaction allergique qui retarderait notre navigation dans la Pacifique 😂

Il y a si peu de vent depuis quelques jours, en dehors des orages et des grains, que l’eau de la marina est comme un miroir, c’est magnifique la nuit avec les éclairages :

Le bon côté, c’est que la mer devrait être assez calme du coup …
On nous a apporté les amarres et les pare battages nécessaires pour le passage du canal, la prochaine fois que je vous écrirai ça sera pour vous raconter le passage … et la trans Pacifique ! au départ on voulait s’arrêter aux Galápagos pour couper la traversée, mais a priori on ne s’y arrêtera pas, ça coûte trop cher et c’est trop pollué par le tourisme de masse qu’ils ne savent pas gérer, mais on verra bien, naviguer ça rend stoïque, être stoïque passant par l’acceptation des événements que nous vivons grâce au contrôle de nos réactions (autrement dit : on verra bien et on fera avec), mais ne pas s’arrêter aux Galápagos fait qu’on devra aller d’un trait jusqu’aux Gambiers, soit au moins 25 jours de nav’ non stop (d’où ma précieuse cure de plantes)


ça se précise !

Lokah Samastah Sukhino Bhavantu
(Puissent tous les êtres de tous les mondes devenir heureux et libres)
J’ai pensé ça vous intéresserait :
- Le Vendée Globe est une course à la voile autour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance. Parmi les courses au large existantes le Vendée Globe est considéré comme la plus difficile des épreuves pour les marins. Elle est généralement marquée par de nombreux abandons et parfois par des tragédies ce qui lui vaut l’appellation d’Everest des mers. Voici le trajet du Vendée Globe en 2020 … qui n’emprunte pas le canal de Panama 😊

- Mais les marins peuvent aussi faire le tour du monde à l’envers, c’est-à-dire contre les vents et les courants dominants. Ce record, baptisé Global Challenge est détenu depuis 2004 par Jean-Luc Van den Heede. Il faut dire qu’ils sont peu à avoir tenté le challenge.

Continue Isabelle tu nous intéresse et surtout profites profites
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J’adore vous lire et toutes vos péripéties. J’espère que vous avez goûté aux gâteaux.
Et un peu d’ordre dans le frigo s’il vous plaît 😂
Téléchargez Outlook pour iOS
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Quel voyage! Chaque semaine j’attends ton reportage et je regarde chaque photo et video avec beaucoup de bonheur. C’est une superbe fenêtre sur le monde que tu nous offres à chaque fois. J’ai hâte de lire le prochain épisode. A bientôt Isabelle. Jeanne
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Le Canal de Panama! Isabelle et le Capitaine! Isabelle autour du monde!
En ce dimanche matin brumeux et pluvieux à Montréal, quel bonheur de te lire! Quelle aventure! C’est du vrai direct!
De superbes photos avec descriptions, annotations enrichissantes; des anecdotes savoureuses et parfois piquantes; et la sincérité de tes états d’âmes
Changer d’océan! C’est comme se voir dans le miroir pas jolie et plus tard sentir la force de ses muscles! C’est pouvoir faire le saut de la déprime au stoïcisme! Et accepter de partir 29 jours sans escale, juste tous les deux pour faire face à l’inconnu! Quel grand passage, quel engagement sur les flots!
Que tu es belle, intelligente et forte! Tu es une déesse brillante Isabelle!
Et je suis vraiment contente de participer…douillettement à ton aventure! Merci pour la date glissée dans le texte; je suis rassurée! J’ai juste hâte de savoir comment tu as vécu ce trajet! Et maintenant …les colliers de fleurs? Bisoussss
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Bon, moi j’aurais bien serré les fesses en passant le canal …
En t’attendant : petit vin blanc bien frais sur la place St. Louis 😃 après avoir passé un log moment avec maman , tout bien. L’un des avantages de la retraite 🤩
Il pleuvra certainement dans la nuit, la température a chuté d’ un coup, cela fera du bien à nos pommes et à nos terres assoiffées.
C’est fou comme tout est propre dans cette région par rapport au Sud! L’esprit Allemand ?
Des bisous à Marc, un salut profond a Bouddha, mille baisers pour toi qui nous manque !
Minouchette
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ah oui la canal de Panama ce doit être une sacrée expérience à vivre. Et vu le trafic qu’il doit y avoir !!! Hâte de voir les photos. Merci Isabelle
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Bonsoir Isabelle c’est fantastique ce voyage
Une merveille
Met
Envoyé de mon iPhone
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merci pour tes partages 🙂
Lokah Samastah Sukhino Bhavantu
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Passionnant ! J’aime le style bien à vous de nous faire partager votre périple ! A chaque fois hâte de découvrir la suite … mon mari à traversé le canal il y a fort longtemps avec la marine Nationale du coup. il a dressé l’oreille à ce dernier épisode 😄 au Galapagos c’était à peu près désert il parait ! (1969 !!!!!) bonne continuation !
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Merci beaucoup, j’aime suivre vos aventures.
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Ah merci Emmanuel, moi quand on me dit qu’on aime ça me motive grave pour continuer à les raconter 😉
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ah c’est certain que depuis 1969 il y a dû y avoir du changement 😊… l’article sur le passage sera publié dimanche qui vient et j’ai mis quelques vidéos et des photos 😉 et un grand merci pour votre gratitude envers mon style Annie 🤗❤️§
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MERCIIII Gini 🤗❤️§
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MERCI Sonia 🤗❤️!
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c’est prévu pour ce dimanche, grâce au ciel j’ai enfin de la connexion 🥲😀!
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je ne lis ton message qu’aujourd’hui et j’attends que la mise à jour de mon portable soit terminée pour pouvoir t’appeler pour te souhater un JOYEUX ANNIVERSAIIIIIIIIIIIRE à ma grande sœur que j’aime tant ! et autant de bisous d’amour que d’années !!! 😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘😘!
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quel talent et quel style tu as pour me faire partager ta générosité ! un immense merci comme un cri du cœur Marithé !
la suite arrive, elle est écrite et attendait une connexion suffisante pour publier, 1er chapitre dimanche qui vient !
et en ce moment c’est tressage de couronnes de fleurs et fleur de tiaré derrière l’oreille si on se conforme aux coutumes locales, tu sauras tout bientôt, et je t’embrasse 😘❤️🤗
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ah merci Jeanne pour ton si gentil message ! la suite arrive dimanche, j’ai dû attendre d’avoir la connexion suffisante pour pouvoir publier ! je t’embrasse depuis une île du Pacifique (celle là a de la connexion 😉° 😘§
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Hahaha pour l’ordre dans le frigo, mais je vous y verrais avec le roulis et la gîte 😂! et oui j’ai goûté aux gâteaux, vous savez comment ça se passe, on les voit et alors on y pense, on y pense et alors on y goûte 😉
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merci Patrick ! oui oui je continue, la suite arrive dimanche, j’ai dû attendre une bonne connexion pour pouvoir publier et en plein Pacifique tintin 😀!
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