
le déssalinisateur !
parlons-en !
là encore, tout un bazar qu’il a fallu installer, mais l’heure est venue de tester la bête et de nous payer de tant de labeur …
on plonge le tuyau qui va pomper de l’eau de mer dans l’eau de mer (pas le plus difficile), et on met celui d’où va couler l’eau adoucie dans le vide au-dessus de la mer (pas bien compliqué non plus) car il est bien précisé qu’il faut laisser couler l’eau pendant une demi-heure lors de la première utilisation avant de remplir les réservoirs, pour vous dire comme on respecte la notice, et on place le tuyau d’où sortira l’eau saumâtre au-dessus de la mer également, pour que ce mélange eau-douce/eau-salée n’aille pas dans le réservoir … je vous passe les détails de l’installation, regarder les photos suffira bien, à moins que vous ne soyez un fanatique, auquel cas vous pouvez me poser les questions qui vous taraudent et je ne manquerai pas de vous répondre 😉
pour faire tourner le merdier (le marin donne des petits noms charmants à toute chose), il y a un moteur, alors hop, on amorce le moteur, ici « on » c’est le capitaine qui s’active et moi qui le soutiens en restant à l’affût quelques pas derrière lui, au cas où je pourrais servir, ne serait-ce qu’à recueillir ses jurons (le capitaine est homme, ne l’oublions pas)


au bout de plusieurs dizaines de tirages d’un coup sec sur la corde du lanceur manuel pour amorcer l’arrivée d’essence et chercher la compression, avec starter, sans starter, avec un peu de starter, pas longtemps, plus longtemps (on a tout essayé), le moteur démarre enfin, soupirs de soulagement de part et d’autre de l’équipage, il cale, crispation de part et d’autre de l’équipage, il repart, nos respirations sont désormais tributaires des caprices de ce fichu moteur, et puis hourra, de l’eau sort du bon tuyau, je peux enfin servir à quelque chose alors je file chercher un verre que je remplis à hauteur de 3 centimètres … ça cale à nouveau, mais bon, si ça a marché, ça remarchera ! en attendant que ça reparte, on goûte à l’eau, bien meilleure que le meilleur des champagnes, je saute mentalement de joie au cou du capitaine mais garde mes débordements pour moi, je sais me tenir (papa serait content de savoir qu’il n’a pas usé tant de salive pour rien)
j’t’en fiche ! si ça a marché ça remarchera ne doit jamais entrer dans liste officielle des proverbes qui dirigent notre vie … le moteur (neuf !) n’est jamais reparti, ce n’est pas faut de s’être échiné à tenter l’affaire, le cap’ et moi on s’est regardé avec effroi :
ON-NE-PEUT -PAS-PARTIR-SANS-DESSALINISATEUR !!!

la mort dans l’âme, nous sommes rentrés au port …et arrivés de nuit … vous pouvez demander à tous les marins, en tous cas à tous ceux que je connais, arriver de nuit au port ou au mouillage, c’est la galère, et le capitaine, qui n’est pas un dégonflé, m’a dit de prendre la barre, faut bien que je m’habitue à me débrouiller, il ne veut pas d’un pleutre moussaillon à son bord … il m’explique comment faire, rien de tel que de vivre la chose dans ses tripes pour la graver à jamais dans sa cervelle (la relation cerveau-intestins n’est pas une légende) !



je connais l’arrivée au port et le port de jour, donc le capitaine me demande quels sont les repères que je connais en approche : le phare de Fort Brescou et la cardinale Sud – tous deux ont des signaux lumineux la nuit que je suis sensée connaître puisque j’ai passé le permis bateau récemment, dans ma tête tout va bien
je regarde alors la mer et le ciel devant moi : noirs, tous deux, avec une myriade de lumières qui clignotent dans tous les sens : les maisons, les parcs d’attraction, le port et ses magasins, les bateaux, et dans tout ça, cachés, les éclats des bouées qui pourraient m’indiquer où passer, je mets mes lunettes, j’enlève mes lunettes, je plisse les yeux, les ouvre grands, finit par apercevoir les petits éclats du Fort de Brescou que je dois laisser à bâbord, rien d’autre, le capitaine me dit de descendre sur la table à cartes pour consulter les cartes (d’où son nom) et remonter en sachant ce que je dois chercher à voir, je dévale la descente, trouve les infos, remonte la descente (si), bafouille ce que je sais, regrette de ne pas m’être fait percer les oreilles comme les vigies-pirates …
le bateau avance vers le port, inexorablement, je piaille que je ne vois rien, et puis si, au dernier moment une bouée à éclats verts que je dois laisser à tribord, le capitaine me met en garde parce que je fonce droit sur la digue, il ne lève pas le petit doigt et reste imperturbable, je rectifie le tir, il me demande si je reconnais le port, non ! je ne le reconnais pas, j’avoue tout, serais même prête à confesser toutes les turpitudes de ma misérable vie, le supplie de prendre la barre, il reste inflexible …

on a fini par y arriver, et le capitaine m’a dit que c’était bien, même s’il a dû manœuvrer en catastrophe pour que je ne défonce le bateau voisin avant de me rendre la barre, il m’a dit que c’était parce qu’il m’avait dit de faire pivoter le bateau un peu tard, peut-être pour me remonter le moral, j’ai pu à cette occasion admirer sa parfaite maîtrise, il me faudra encore quelques années pour y arriver je crois … mais j’y compte bien 🙂

on sait que quand on ressortira le bateau de son emplacement, ça sera pour le vrai départ, je me suis inquiétée auprès du capitaine de savoir si je savais suffisamment naviguer, il m’a répondu que l’envie compte plus que le reste, alors je suis parée de ce côté là
bon : il faut qu’on résolve au plus vite ce problème de moteur du déssalinisateur, qu’on charge le bateau de tout ce qu’il faut emmener, ça va prendre quelques jours …
à suivre !
la minute culturelle du jour 🙂
- à bâbord c’est à gauche et à tribord c’est à droite, j’ai donc demandé au capitaine pourquoi on ne disait pas tout simplement gauche ou droite ? le langage marin me fait parfois penser aux curés qui parlaient en latin pour se différencier des non-initiés, mais n’y voyons pas malice, le marin est sain d’esprit 🙂 : bâbord c’est à gauche quand on est tourné vers l’avant du navire (Vessel en anglais), mais si on se tourne vers l’arrière du navire, la gauche change de place ! alors pour éviter de se paumer entre la gauche et la droite si on est face à l’avant ou à l’arrière du bateau, on dit bâbord ou tribord pour que ça ne change pas de place, dans cap de miol, les toilettes sont à tribord de jour comme de nuit, que j’avance vers l’avant ou vers l’arrière du bateau (faut quand même réfléchir)
- la descente d’un bateau est une petite superstructure donnant accès, par une échelle ou un escalier, à l’intérieur du bateau, on l’appelle donc descente même quand on la remonte
- la cardinale sud est une balise qui indique qu’il faut passer au sud de cette marque, ce qui sous-entend qu’il y a un danger au nord – quand on sait ça, on le sait pour les autres cardinales, à savoir est, ouest et nord – elles ont des couleurs spécifiques et, pour la nuit, des scintillements qu’il vaut mieux connaître pour ne pas s’échouer lamentablement sur un danger quelconque
- les vigies des bateaux pirate se perçaient l’oreille pour y voir plus clair et, en auriculothérapie, l’endroit de la boucle d’oreille correspond parfaitement au point de la vue !

PS : ah ! je me souviens de la liaison malheureuse (on va voir si vous lisez jusqu’au bout 🙂 ) : je disais « cela va t’être » au lieu de « cela va être », et je ne suis pas la seule à le dire, j’entends souvent des journalistes le dire, d’ailleurs on m’avait fait la remarque quand je faisais de la télé, le réalisateur coupait et me disait de recommencer, c’est ça qui a fait que je me suis corrigée, parce que recommencer à tourner une séquence de gym depuis le début, ça fait rouspéter toute l’équipe, on n’a pas que ça à faire quoi !

Oh my God ! ça n’est pas sympa mais je préfère pour toi que pour moi ! Bravo Matelote ! Bons préparatifs! Et merci pour toutes ces explications !
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On y est, on y est🌊🌊🌊je n’ai pas pris le temps de lire tous les posts , mais j’y compte bien, Merci Isabelle de nous faire naviguer,
Incroyable comme cela me retire du quotidien……je me sens flotter sans vivre les tourmentes, ou plutôt en comprenant que ce n’est pas tout simple, comme dit le Capitaine avoir l’envie c’est le principal et ça Isabelle on peut en être sûr 🌊👏🌊👏🌊🙏🦋
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Comme navigatrice on verra, c’est prometteur vous avez l’air studieuse moussaillon !😁 comme reporter j’adore votre écriture et cette pointe d’humour ! Le ton est donné ! On va envoyer des ondes positives au dessalinisateur caractériel ! Attention il vaut mieux déssaliniser que dessaler ! 😂
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C’est super chouette tout ça ! J’adore vous lire .. Et tout va bien , « c’est le métier qui rentre » !!
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Bonjour Isabelle,
J’adore le récit de tes aventures mais alors là NON !!! Comparer de l’eau de mer dessalée, dessalinisée ??? Ah bah zut on dit comment ??? à un champagne ce n’est pas possible ou alors tu n’as pas bu de champagne depuis trop longtemps et dans ce cas je t’invite à en boire une coupe quand tu veux 🥂. Ou alors tu as perdu le goût et là je pense que tu connais le syndrome 😜 (sinon appelle moi pour une consultation 🤣). Étant d’origine champenoise tu comprends que je ne peux évidemment pas laisser passer cela… 🍾
Bref, en ce qui concerne les liaisons d’orthographe malheureuses je ne supporte pas le “cent z’euros” mais je renonce la plupart du temps à en faire part à mes interlocuteurs car ils me regardent avec des yeux de merlan frit, à ce propos je n’ai jamais regardé les yeux d’un merlan frit donc si tu en pêches un, pourrais tu le prendre en photo stp ? 🐟 🎣📷
Bravo pour ta maitrise et ton self-control concernant la navigation. Le port la nuit ressemblant plus à un parc d’attraction qu’à un port (bien que je n’y connaisse absolument rien en port) il ne doit effectivement pas être simple de s’y repérer.
Merci pour toutes les explications et d’autant me faire rire …
PS : je compte bien utiliser le mot “orchidoclaste” car j’en connais quelqu’uns qui, de tout évidence, n’y comprendront rien, je m’en réjouis d’avance 😂
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bin, on dit désaliniser ou dessaler, ce sont des synonymes, ce n’est pas moi qui compare 🙂
« Le dessalement de l’eau ou désalinisation est un processus qui permet d’obtenir de l’eau douce à partir d’une eau saumâtre ou salée »
« désaliniser \de.sa.li.ni.ze\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)
Enlever le sel de l’eau de mer afin de la rendre potable [2] »
voilà voilà 😉
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ah oui Marie-Agnès, il rentre, je peux vous le dire 😀 !
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c’est clair qu’on va éviter de dessaler 😆 !
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❤ !
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Merci pour la réponse
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😉
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