
On décide de partir plus tôt que prévu des Gambier parce que j’ai fait ce que j’avais à faire ici et surtout parce que j’ai besoin d’une vraie connexion internet pour véritablement travailler et que j’en ai un peu marre du poulet-frites de chez Jojo que je mange presque chaque fois que j’y suis parce qu’il n’y a souvent pas d’alternative et que je suis bien obligée d’y manger pendant que la connexion mouline sur mon travail (il y a des jours où ça plante et où on n’a aucune connexion au point de ne même pas pouvoir payer en Carte Bancaire alors on nous dit de repasser demain, ici la confiance règne car il ne viendrait à l’idée de personne de ne pas payer ce qu’on consomme), le capitaine lève les voiles à regret car il y serait bien resté encore, mais d’autres horizons nous attendent capitaine ! et comme il est curieux de la suite cela tempère ses regrets

Comme d’hab quand on part, le bateau a été lavé et le frigo un peu rempli, on ne va pas très loin, atoll d’Hao aux Tuamotu, 465 NM, selon le vent on en a pour 3 ou 4 jours, le capitaine m’assure qu’internet sera nickel là bas, j’espère que ça ne refera pas le coup de Snug Harbor aux San Blas mais garde cette réflexion pour moi, en quelques jours de mouillage j’ai déjà perdu des réflexes de navigation à mon grand désespoir, mais ça revient vite, et puis on part par beau temps en ce 21 mai, ce qui n’est pas négligeable … mais peu de vent ! 5 à 7 nœuds, alors on garde le moteur un certain temps en plus de la grand-voile, aussi parce qu’il faut recharger les batteries comme il ne faisait pas très beau ces derniers jours donc pas de soleil pour les panneaux solaires, et l’hydrogénérateur avait encore perdu une hélice et on a oublié de le réparer (c’est mal)
Comme il y a une belle houle, après le mouillage calme de Rikitea et que j’ai manœuvré la tête vers le sol, ça ne loupe pas, je suis patraque le soir et le capitaine me dit d’aller dormir ce que je fais en l’abandonnant lâchement, et comme le vent n’en fait qu’à sa tête, adonne ou refuse au gré de son envie, le capitaine passe sa nuit à régler les voiles, je me lève fraîche comme un gardon tandis qu’il accuse le coup mais on envoie le spi, même crevé le capitaine envoie le spi si le temps et l’allure l’imposent à un marin qui se respecte et en fin de matinée on se prend un gros grain, spi et bateau rincés, c’est coton un grain sous spi, après ça vent à 13 nœuds jusque dans la nuit où ça tombe, on affale et moteur, et puis ça repart plus tard alors GV et on envoie le gennaker, on ne s’ennuie pas même nuitamment
Mardi, 15h, le vent tombe à nouveau
Le capitaine se résout, la mort dans l’âme, à remettre le moteur, et se rappelle qu’auparavant il vaut mieux qu’il nettoie le filtre à eau de mer qui refroidit le moteur, alors il s’y colle et renvoie le moteur comme prévu, mais au bout de quelques minutes un cri déchirant MEEEEEEEERDE ! me transperce les tympans, le capitaine saute sur la clé de contact et coupe le moteur, c’est le genre de truc qui me file un bon coup d’adrénaline parce que je pense de suite à quelque chose de grave et là qu’il y a le feu à bord à cause du moteur, je suis prête à sauter sur un extincteur et à arroser le bateau de mousse tel un troufion cinglé son lance-flammes sur du napalm (apocalypse now ? voyage au bout de l’enfer ?) mais le capitaine s’invective en se traitant de tous les noms d’oiseaux et ça ne sent pas le brûlé alors je laisse tomber, pas de soirée mousse en perspective (une des meilleures soirées de ma vie, une soirée mousse à l’Etoile, une boîte de Metz, rentrée à 5 heures du mat, le lendemain je ne pouvais plus tourner la tête tellement je l’avais hochée en tous sens toute en transe que j’étais) … le capitaine avait fermé la vanne d’arrivée d’eau pour nettoyer le filtre mais oublié de la rouvrir, alors la température du moteur est montée en flèche puisque le moteur ne se refroidissait plus et c’est quand il a vu l’aiguille sur le compteur de température que la mémoire lui est revenue d’un bloc, je reste immobile en attente de la suite mais le capitaine est toujours économe de mots autant que d’explications, je dois lui tirer les vers du nez
- alors on fait quoi ?
- je sais pas (bien sûr qu’il sait, juste il réfléchit)
- …
- faut changer le rouet il doit être fichu (quand je vous dis qu’il sait)
C’est tout un cirque parce qu’il faut aller le trouver le rouet de pompe, et puis les outils, tirer la descente pour avoir accès au moteur, le capitaine accroupi en bas et moi à 4 pattes en haut pour l’aider pas de menues taches (il me passe des saladiers d’eau que je vais balancer par dessus bord avant de revenir à 4 pattes, tous mes sens en éveil afin d’être réactive à ses demandes car même si c’est lui qui a fait la connerie, c’est moi qui risque de prendre à la moindre incartade, l’homme étant ainsi fait qu’il a tendance à passer ses nerfs sur qui passe à sa portée) (les saladiers sont en plastique, on dirait de la vaisselle de camping sauf quelques verres de cuisine en verre parce que le ti punch dans un verre en plastique ça fait peine)
Une fois fait, par ailleurs plus vite que je ne l’aurais cru, la respiration suspendue et les épaules levées comme pour se protéger d’un coup on remet le moteur en route … le moteur crache de la fumée, de l’eau, toussote, encore de la fumée, je suis penchée sur la jupe pour voir ce qui sort du conduit fumée … ah ! un peu d’eau ! de l’eau ! encore de l’eau ! c’est bon signe quand c’est de l’eau, on prie en silence chacun de notre côté et ça repart, le moteur tourne, hourra ! nos épaules redescendent d’un étage
Mais pendant ce temps là le vent est remonté à 8/9, alors pas besoin du moteur , c’est GV + Gennaker jusqu’à 20h où de nouveau plus de vent et moteur, ne riez pas c’est pas drôle, pour de bon c’est galère de naviguer comme ça

Le soir le capitaine a mal au crâne, sûrement que le coup du rouet lui a fait monter la tension et que ça bouillonne encore à l’intérieur, alors je lui dis d’aller dormir et que je veille, ce que je fais allongée sur ma couchette en mettant mon téléphone à sonner toutes les demi-heures, autant dire que je ne dors pas bézèf, et puis quand la fatigue me tombe vraiment sur les épaules comme la misère sur le monde, je vais tapoter l’épaule du capitaine pour lui demander de mettre son réveil à lui après un topo sommaire (tout va bien, personne à l’AIS ni à l’horizon, toujours pas de vent) et après ça je roupille quoi qu’il arrive

Le capitaine a calculé son coup pour arriver au lever du jour à la passe kaki de l’atoll d’Hao, il ne dort pour ainsi dire pas, et le mercredi matin, bingo, tout comme il a dit on est en vue de la passe quand le jour se lève à peine car il faut la passer pendant l’étale …
Je vous explique (grâce au capitaine qui n’est jamais avare de me raconter la mer et le vent et leurs plaisirs)
Un atoll c’est comme une cuvette entourée de récifs de corail, la mer rentre dedans de tous côtés par des vagues et encore plus avec la marée montante, mais aussi la pluie, et l’atoll se vide en permanence dans l’océan puisque l’eau déborde de la cuvette à force d’être remplie, vous voyez le topo
À Hao, la passe (c’est à dire le passage où un bateau peut entrer et sortir de l’atoll) c’est l’endroit où ça revient à enlever le bouchon de la baignoire, tout se vide par là, cette passe donc est toute étroite et il n’y en a qu’une, on est prévenu : le courant y est très fort, certains bouquins de nav’ le donnent à 20 nœuds, Navionics le donne à 12, le capitaine me raconte tout ça, fort bien, et m’explique qu’il faut passer à l’étale de marée haute car quand c’est marée basse, comme ça fait vases communiquant, l’atoll se vide encore plus et le courant est encore plus fort – alors que moi, en toute logique, je pensais qu’à marée montante ça nous aiderait à entrer et qu’à marée basse ça aurait tendance à nous pousser dehors, qu’est-ce qu’on est bête quand on est ignorant … en plus de tout ça, il ajoute que la passe Kaki est réputée pour avoir le courant le plus fort de la Polynésie, soit, je hoche la tête à toutes ces explications destinées à me faire comprendre son choix de passer à l’étale de marée haute comme si j’avais l’intention de m’élever contre cette idée
Forts de ces judicieux commentaires, vous pouvez suivre désormais ce que je vous raconte
Donc le jour se lève et nous arrivons en vue de la passe, et soudain nous voyons des vagues qui déferlent là où elles ne devraient pas, nous pensons tous les deux qu’il y a un sec, je fonce voir sur Navionics qui ne référence rien à ce sujet, le capitaine laisse les vagues à tribord en partant vers les bouées qui signalent la passe pendant que je maugrée que Navionics c’est des brêles, et hop c’est parti mon kiki, Hoa nous voilà, les Hoatiens n’ont qu’à bien se tenir !
Mais soudain, violemment, le bateau se met à danser, à sauter, des vagues nous entraînent, nous balancent en tous sens, j’entends des trucs qui se cassent la gueule dans le carré, le capitaine a coupé le pilote et pris la barre parce que le pilote est perdu, il me crie de m’asseoir, il est debout avec les pieds tellement écartés pour tenir en équilibre qu’on dirait Vandamme qui descend en grand écart facial avec les pieds posés sur des briques, se faisant il glapit sèchement
- montre moi la tablette !
Je m’avance pour m’asseoir presqu’à ses pieds et la lui tends à bout de bras pour qu’il puisse se repérer sur Navionics, cette fois il aboie qu’elle ne marche pas, qu’elle raconte n’importe quoi et nous oriente dans le sens inverse d’où nous allons, je regarde et c’est vrai qu’au lieu de nous mettre le nez vers la passe, elle nous met le nez comme si on en sortait, le capitaine fait rugir le moteur, le bateau bascule d’un côté, de l’autre, vraiment c’est sévère, je ne m’attendais tellement pas à ça !
- Est-ce qu’on avance ?! crie t’il
- je crois que oui ! crié-je tout autant que lui pour passer le bruit du moteur
- Montre moi la tablette !!
- tiens (tendue à bout de bras)!!
- elle marche pas !!! (je sais qu’on dirait que je raconte deux fois la même chose mais c’est qu’on doit avoir le goût du comique de répétition)
et je comprends soudain en voyant le tracé jaune qui trace notre route
- bon sang on recule ! c’est pour ça qu’on est tourné vers l’autre sens ! On recule !!!
Le capitaine me réclame de le tenir au courant de ce que raconte la tablette pendant qu’on dirait qu’il jongle avec la barre et ses jambes pour suivre Cap de Miol dans les vagues du courant, je ne saurais dire combien de temps cela dure, 5 minutes, 15 ?
- PUUUUTAIIIIN JE ME FAIS EMBARQUEEEEEEEEEER !!!!!
Le bateau gîte d’un côté puis de l’autre et dérape vers les rochers, le visage du capitaine est tellement tendu qu’on dirait qu’on lui tire la bouche de chaque côté avec des gros élastiques, moi je dois être blême car je vois qu’on va être éjectés comme un fétu de paille sur les rochers le long de la passe et se crasher comme des merdes, end of the trip, on est foutus, en même temps je pense que ce n’est pas possible, que le capitaine ne peut pas se faire embarquer, sinon c’est le monde qui s’écroule, le capitaine est fait pour résister contre vents et marées, je ne peux pas m’être trompée à ce point sur son compte, il doit plaisanter et va se rire de ma frayeur, mais non, il a les pieds encore plus écartés que tout à l’heure si c’est possible et sa bouche va bientôt péter à force de tirer sur les élastiques, je ne peux rien faire que de me retenir de crier au secours, sauter à l’eau serait pire que tout parce que je serais charriée comme un vulgaire tronc d’arbre dans un torrent, qu’est-ce qu’on va devenir dans ce merdier, pourquoi je suis là mais qu’est-ce qui m’a pris de jouer ainsi avec ma vie, je vois le capitaine avec des yeux deux fois plus grands que la normale qui pousse la barre, qui la tire et la repousse, je ne sais pas comment il s’y prend mais au bout d’un moment on sort du courant hallucinant qui nous ballotait avec une force dingue, les vagues que nous pensions déferler sur un sec sont les vagues du courant de la passe …
Ça ne se voit pas mais j’ai tout le corps qui tremble de l’intérieur, le capitaine me dit qu’on va retenter l’affaire, t’as raison tiens, mon cœur va lâcher ce coup-ci mais tout le monde s’en fout, et puis il décide qu’on a dû arriver trop tard après l’étale et qu’on va aller attendre plus loin la prochaine étale de marée haute, vers 17h30, moi je suis juste contente qu’on ne retente pas le coup de suite et que j’aie le temps de me faire à l’idée qu’on va y retourner tôt ou tard
- on peut faire des aller-retours au moteur ou on se met à la cape …
- à la cape ! (pitié)

On se met à la cape et le capitaine qui n’a encore une fois pas beaucoup dormi et s’est dépensé dans la passe, c’est rien de le dire, va se coucher pendant que je m’installe dans le cockpit pour bouquiner en jetant un œil sur la passe qui s’éloigne au fur et à mesure que nous dérivons à la cape … au bout d’une heure je ne vois plus de vagues qui déferlent au loin dans la passe … mais on n’est encore pas à marée basse et encore moins à l’étale … que faire ? Laisser le capitaine dormir et risquer de manquer une fenêtre pour passer ? le réveiller et foncer pour passer tandis que le ciel nous offre cette possibilité ? je me tâte, il n’a dormi qu’une heure, et puis je pense qu’il ne me pardonnera pas de l’avoir laissé dormir alors qu’on pouvait passer, je descends lui chatouiller une plante de pied pour le réveiller, ça ne marche pas alors je lui tapote un mollet
- quoi ?
- je crois qu’on peut y aller, ça ne moutonne plus
il est déjà debout
- t’es sûre ?
- viens voir (je ne suis jamais sûre avec lui) (il a ce don)
On sort et je lui montre avec plaisir cette mer calme et cette passe qui l’est de même
- mais non ça bouge toujours autant, c’est juste qu’on a dérivé et que sous cet angle tu ne vois plus les vagues
- tu crois ? mais non ! Regarde comme c’est calme !
Il me dit et redit la même chose et je le regarde de travers, il est con ou quoi, ça se voit que c’est calme, mais il insiste et sa voix monte toujours quand il doit insister parce que je ne gobe pas ce qu’il me raconte, alors platement je suggère qu’il aille se recoucher et que tant pis si on voulait entrer quand c’est possible et qu’ensuite ça ne le sera plus et ajoute que je suis désolée de l’avoir réveillé pour rien, il doit lire sur mon visage que je ne le crois pas une seule seconde
- on y va !
- mais non, va dormir
j’enroule le bout de génois que j’avais mis pour être à la cape, moteur et on file vers la passe … plus on s’approche, plus ça moutonne, plus ma mâchoire descend d’étages
- mais c’est dingue ça ! de loin on aurait dit qu’il n’y avait plus une seule vague
et de me ré expliquer que parce qu’on a dérivé on ne voit plus les vagues, moi je veux bien, mais à ce point ! je n’arrête pas de lui dire à quel point je n’en reviens pas de ce mirage dans mes propres yeux !
on regarde le courant telle la crue de l’Amazone qui déboule et emporte tout sur son passage, c’est à une autre échelle mais ça me fait penser à ça, je déglutis, le capitaine ne retourne pas se coucher et décide de faire des allées venues le long de la passe, les yeux rivés sur le courant, guettant une embellie et n’arrêtant pas de vérifier sur Navionics l’heure de la prochaine étale, en plus on n’est même pas certains de l’heure locale parce que hier à 17h30 il faisait presque nuit alors est-ce qu’on est à la bonne heure
- Mais ça dure combien de temps l’étale ?
- ça dépend
nous voilà beaux …


À 17h le capitaine n’y tient plus, il veut tenter le coup avant la nuit et on ne sait jamais, imagine si ça passe
- je ne suis pas sûre, t’as vu comme ça déferle ?
Il ne prend pas la peine de me répondre, l’hésitation ne fait pas partie de son répertoire, on lit la détermination dans son regard intense, il se prépare en mettant plus de gaz et je file chercher la tablette pour la lui mettre sous le nez à sa demande, il longe le plus possible la côte pour se jeter dans la passe au dernier moment, il n’y a pas une grande distance à faire une fois dans la passe, c’est à portée de main, le moteur rugit et les yeux du capitaine s’exorbitent, arghhhh ! je le préviens qu’on va dans les cailles et lui indique la profondeur
- 3 mètres !
- 2 mètres 50, faut t’écarter !!!
- on va dans les rochers !
Il reste de glace, sourd à mes imprécations, continuer encore, aller le plus loin possible près de la côte pour n’avoir qu’un tout petit peu à faire dans la passe, ça devrait marcher comme ça, et il s’y jette en faisant encore plus rugir les chevaux, aussi sec on se refait balloter en tous sens au point de me faire me demander combien de temps le bateau peut tenir avant de se retourner, je lui raconte ce que je vois sur Navionics pour l’aider à nous tirer de là mais ne suis pas très optimiste sur la réussite du projet, … et pourtant …
- c’est bon on avance ! (et qui c’est qui va aller boire une bière au bistrot dans pas longtemps ?)
avant de lui mettre la tablette sous le nez, il y jette à peine un œil qu’il replace aussitôt vers les bouées de la passe, toutes jambes écartées pour être campé afin de résister aux sauts du bateau
- on recule ! merde on recule !!!
Encore plus de gaz
- on recule encore !!!!!
Les gaz à fond, le moteur va exploser, ça sent le chaud
- ça sent le chaud !! on recule !!
tablette sous son nez
Il tente de résister puis, devant l’évidence, ralentit le moteur et s’écarte du courant avec le bateau qui danse, j’ai le cœur qui tressaute dans ma poitrine, on s’éloigne à peine, le capitaine regarde la passe ainsi qu’un aigle un lapin de garenne à l’instant de lui fondre dessus
- on y retourne
On se fait jeter encore deux fois et la nuit est là, l’étale est passée, que fait-on, voilà nos choix : attendre devant la passe qu’une étale finisse par nous permettre d’entrer (on a discuté avec un local qui est passé dans sa barque avec un moteur de 80 chevaux, peut-être même plus dit le capitaine quand je le lui demande, qui peut marcher à 30 ou 40 nœuds avec sa barque qui ne pèse rien, le moteur de Cap de Miol fait 55 chevaux mais pour un bateau qui pèse 12 tonnes avec tout le matos et l’eau et le gaz oil et les boites de conserve, on marche à 7 nœuds avec les gaz bien poussés, on joue pas dans la même cour, le gars nous a dit que c’est incroyable mais en général à l’étale il n’y a plus aucune vague ni courant et on peut passer, et il a regardé la passe et conclut pas aujourd’hui) ou s’en aller
- pour aller où ?
- sur l’atoll d’Amanu tout prêt mais on ne peut pas mouiller de nuit donc faut attendre demain …
- et si on filait directement aux Marquises ?
- euuuuh
- ah moi faut absolument que je bosse, j’ai besoin d’Internet ! (tu penses bien qu’à Amanu y’a rien de rien !)
- ou alors on attend pour voir si on peut entrer à Hao
- mais on va devoir attendre peut-être une semaine ! Même plus !

Alors on décide de filer aux Marquises, encore 4 jours de nav
- on a assez d’eau et de bouffe ?
- oui ! et comme ça on y sera pour mon anniversaire 🎂 !
On hisse la grand-voile, on déroule le génois et on laisse les lumières d’Hao dans le rétroviseur (Nous apprendrons plus tard qu’il y avait une alerte orange à la houle dans les atolls des Tuamotu et aux Australes) (c’est pour ça)

Qu’est-ce qui vous ferait plaisir de savoir, mmmmh ?
- L’étale est la période pendant laquelle le niveau de la mer reste à peu près constant. On distingue l’étale de pleine mer (PM) entre la fin du flot et le début de la marée descendante, et l’étale de basse mer (BM) entre la fin du jusant et le début de la marée montante.
- Le marnage est la différence de niveau entre la marée haute et la marée basse d’une marée

- L’atoll de Hao était la Base Aérienne 185, une ancienne base aérienne utilisée par l’Armée de l’Air et l’Aviation Navale, située à 919 km à l’est de l’île de Tahiti dans l’archipel des Tuamotu, en Polynésie Française. Cette Base fut créée le 1er juillet 1963, elle servait, notamment, de base logistique aux éléments stationnés sur l’atoll de Moruroa (Mururoa). Devenue par la suite base du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP). La base arrière de Hao, située à 400 kms environ de Moruroa, fut d’une importance capitale pour les essais car la piste d’atterrissage avait été conçue pour recevoir de gros avions tels que les Boeing. Les bombes étaient entreposées dans les hangars de la base aérienne et gardées par des hommes sans protection spéciale. Elle était une base arrière non négligeable et très stratégique pour la logistique, la base des équipes de surveillances radiologique (S.M.S.R) et radio biologique (S.M.C.B). Les avions de chasse qui tiraient des missiles dans le nuage nucléaire étaient également basé à Hao et ils irradiaient la base … pour en savoir plus : https://www.radiofrance.fr/franceculture/polynesie-une-ancienne-base-atomique-transformee-en-ferme-aquacole-geante-6170251
- Passe Kaki (le cou) de Hao : une légende dît que l’on doit demander à la déesse Kaki l’autorisation de franchir la passe et les quelques aventuriers qui passèrent outre ou blasphémèrent se sont retrouvés à l’eau. D’autres pêcheurs par contre dont le bateau allait être projeté sur les récifs par la mer démontée ont appelé la déesse qui est venu les secourir.
Ben ça décoiffe rien que de te lire !!’
Bises fortes !!!
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Waouh! quelle aventure! Il faut avoir un mental d’acier et le coeur bien accroché pour faire face à tout ça. Il faut aussi de l’expérience et un sang froid à toute épreuve. Merci pour ce partage. A bientôt pour la suite.
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Hé bien! Il faut avoir les reins solide pour naviguer contre vents et marées, immense admiration pour ce périple qui m’a l’air d’être des plus formateur.
Bon courage.
Ps: Est-il possible de vous joindre? J’aimerais vous poser quelques questions sur la formation de MTC.
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Merci, 🙂
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Coucou des Biterrois,
Le 31 juillet 2022 : ici grosse canicule l’eau de la piscine a 35 degrés ( du jamais vu !!!) et nous en profitons pour se rafraîchir (je pense climat d’Andalousie depuis ces derniers temps) Toujours accros de vous suivre dans cette fabuleuse aventure, parfois tumultueuse avec les caprices du climat et les imprévus, mais le capitaine fait plus qu’assurer et Isabelle toujours au top ( même avec des émotions) Bravo à vous 2 ( que de beaux souvenirs inoubliables) Dans le quartier tout va bien Nous avons navigues dernièrement avec Roland, nos petites filles et Émilie, c’était sympa!!! Il rêve de partir vers Minorque en septembre et cherche un co-équipier, pas simple !!! Bonne continuation, en attendant la suite de votre épopée on vous embrasse Nicole et Robert
Envoyé de mon iPhone
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bonjour Jeanne, alors vraiment je ne pense pas avoir un mental d’acier ni le cœur bien accroché, mais plutôt que de vivre tout cela me fait penser que même sans être comme ça, ça vaut la peine de se faire de sacrées trouilles 🌞😉!
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bonjour Lisa, c’est en forgeant qu’on devient forgeron 😉!
et vous pouvez m’écrire sur isabelle@centre-tao.com, il vaut mieux penser à regarder dans ses spams si vous ne voyez pas arriver a réponse, ou alors m’écrire sur capdemiol@myitidium.net parce que là c’est une liaison satellite et que j’y ai toujours accès quand je n’ai pas de connexion classique – alors à bientôt !
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🤗🙏❤️
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merci pour ces nouvelles Nicole, c’est adorable ! je transmettrai au capitaine (qui ne cesse de m’émerveiller !) et qui pour l’heure est en plongée nocturne … nous suivons un peu les nouvelles de la métropole et avons vu que la canicule sévit, mais tout de même, une eau à 35 degrés ! même pas de quoi se rafraîchir ! ici c’est l’hiver et les soirées sont fraîches avec pas mal de vent, mais cela nous permet de bien dormir … en tous cas vous êtes trop gentille de dire que je suis toujours au top, je ne pense pas que ça soit l’avis du capitaine hahaha ! mais on fait des efforts 😉! je vous embrasse et pense ne pas m’avancer en vosu disant que le capitaine en fera tout autant 🙂
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Bonjour aux hardis navigateurs.
La passe kaki je l’ai fréquenté durant 36 mois ou j’ai fait 243 plongées dans ce lieu assez magique mais tout aussi dangereux. En plus de mon métier sur la base en tant que chef de la station météo , j’étais président et responsable technique du club de plongée. Le courant dans cette passe dépend de la saison , des périodes de fortes houle de Sud activé par les dépressions polaires qui défilent plus au sud ,de la position de l’anticyclone de l’ile de Paques et de son régime d’alizés de sud-est , et des périodes de marées. Il faut savoir que pour Hao la passe se trouve dans le prolongement de l’atoll ce qui fait une aspiration maximum , contrairement aux autres atolls ( Rangiroa par exemple ) ou les passes sont transversales et de ce fait le courant est moins puissant. Tous ces paramétres contribuent à accélerer le courant sortant. Pour rentrer dans la passe avec le courant rentrant il faut rentrer avec une période de marée a fort coefficient pour que l’étale de pleine mer vienne contrer le courant sortant car il y a toujours malgré tout un contre-courant sortant surtout sur les 2 cotés de la passe. Par courant sortant fort , les abords de la passe sont calmes , par contre le mascaret est important. Le créneau pour bien rentrer dépend de tout cela. La passe kaki doit être prise au sérieux.Bonne navigation.
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bonjour Jacques, et un grand merci pour votre mail détaillé et instructif 😊
Est-ce que vous faites toujours de la plongée ? êtes-vous toujours en Polynésie ?
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Je ne suis plus en Polynésie depuis 1984 et avec ce que j’ai vu durant mes plongées j »en ai fait une overdose. Et puis les aventures sous-marines je voulais y mettre un terme car surtout à la passe Kaki j’ai fréquenté un monde sous-marin dangereux ou les poussées d’adrénaline étaient présentes à chaque plongée.Tout s’est bien passé sans probléme de plongée ou accident avec les mamiféres marins. En plus de mon séjour à Hao , j’ai passé la Polynésie en revue avec mon métier. Cela a commencé en 1967-1968 atoll de Reao , fin 68-juin 69 : les gambiers ,juillet69-noembre 69 atoll de Puka-puka, decembre69- mai 70 retour aux gambiers. Retour en France puis de fevrier71 a sept71 aviso-escorteur Charner lacher de ballons sondes – octobre 71 a octobre 72 ile de Rapa-australes. Rentrée en France.De fevrier 74 avril 74 convoyage matériel sensible sur le TCD Orage de Brest a Mururoa. De mai 74 a octobre74 atoll de Tematangui. Octobre 74 a avril 76 Météo Papeete. De aout 79 a juillet 84 atoll de HAO.
J’ai plongée dans les 4 archipels sauf celui des Marquises que je ne connais pas . J’attends un creneau pour m’offrir , sur le paquebot-cargo L’Aranui le voyage aux Marquises pour boucler la boucle.
Avec l’aviso en 71 nous avons passé 48h sur l’ile de Pitcairn entre autres.
J’ai des souvenirs à perte de vue et je vous souhaite la méme vie que la mienne avec les mémes sensations que l’on ne peut pas raconter à tout le monde. Aussi si vous avez des questions concernant la navigation ou la météo n’hésitez pas a me contacter. Je n’ai pas décroché des prévisions météo car je fais du routage pour aider des amis qui vont en croisiéres en Méditerannée et en Bretagne. J’ai également une formation marine trés poussée ( permis toutes catégories plaisance ) et une formation marine et oceanographique tout aussi poussée.
Voilà vous savez tout , soyez prudente surtout dans les mouillages lagonaires . Autre anecdote en decembre 1982 el nino a fait des ravages en Polynésie durant 4 mois avec 7 cyclones , j’étais a Hao comme responsable de la station météo ,le cyclone Nano a frappé l’atoll fin janvier 83 avec des vagues de 18métres de haut…..
Bonne continuation dans ce monde de rêve mais qui cache souvent de gros soucis.
Cordialement jacques Salvetat.
PS/ Dans les années 90 j’ai fait la connaissance d’un navigateur solitaire Alain Kalita et quand il est parti faire son tour du monde il a fait une escale A Rapa-australes. Je lui avais confié de nombreuses photos prises en 1971 qu’il a montré à la population 20 ans plus tard. Il a été reçu comme un dieu.
Si par hasard vous faites escale sur l’atoll d’Amanu j’ai quelques photos ou j’avais fait plonger le maire et son condeil municipal que je pourrais vous envoyer, cela vous servirait de passeport pour étre bien reçu.
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merci pour cette belle et longue réponse Jacques, quelle vie incroyable vous avez eue ! est-ce que vous pouvez me donner votre adresse mail au cas où j’aurais besoin de vos lumières météorologiques pour la suite de notre périple ?
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Suite à votre demande je vous passe mon adresse mail/ salvetat.jacques@wanadoo.fr
Vous également vous avez de belles choses a raconter. Soyez prudente car la mer ainsi que la météorologie marine exigent de l’étre.Pour cela je vous recommande un livre » navigation par gros temps » de Aldard Coles et Peter Bruce , éditions Gallimard voiles. 500 pages de récit et aventure qui pour moi fait partie de la bible du navigateur. A bientôt et n’hésitez pas à me contacter si vous avez besoin de conseils.
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merci Jacques 🙏🌞!
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